mardi

Chronique d'un rêve


Dame GPS ne sait pas lire. Je m’étais déjà rendue compte qu’elle confondait la droite de sa gauche, mais elle ne sait pas lire. Route barrée et itinéraire conseillé… sont des mots absents de son répertoire.
Mais finalement, après lui en avoir voulu (pendant une bonne demi-heure, quand même), je reconnais que j’ai bien fait de ne plus l'écouter et de conduire jusqu’à ce qu’elle s’arrête de me dire d’une fois lancinante… « faites demi-tour dès que possible ».
Le tout, c’est que j’ai conduit… conduit… conduit… pour me retrouver… quelque part… mais où ?
Je suis allée… c’était quand déjà ? ah oui, hier… (c’est fou comme quand on part et qu’on est bien, le temps s’arrête…) ouvrir les cadeaux de mes enfants du côté de Saint Rémy de Provence… je dis bien « du côté », parce qu’en l’occurrence, je ne savais pas où j’étais, du tout, sinon sur une petite route qui serpentait au milieu d’arbres et de champs de coquelicots. Il n’y avait rien. Pas un panneau indicateur. Rien.
J’étais en train de me dire que ce serait quand même pas mal si j’en trouvais un (ne serait-ce que pour me donner une idée du nombre de kms parcourus pour m’éloigner du but de mon voyage…) quand soudain, au milieu d’un océan de verdure, je vois deux tours de pierre dressées vers le ciel bleu. Une merveille.
N’étant plus à une heure près… je me suis arrêtée, bien sûr…
L’abbaye de Saint Michel de Frigolet…
Magnifique. J’ai passé le petit portail en fer forgé pour découvrir un monde de douceur. Cette longue allée, bordée d’arbres, menant à une vierge, juste installée là, comme ça… tranquille.
N’étant plus à deux heures près… je me suis dit qu’il serait bon d’y déjeuner.
(A toutes fins utiles, je suis partie de Sète à 9h30…  sachant qu’il faut –normalement- à peu près à peine plus d’1h30 pour rejoindre les environs de Saint Rémy… ça laisse rêveur…). « Restaurant-buvette »… flèche…
N’ayant pas Dame GPS avec moi, je l’ai trouvé sans problème… une courette, au bout d’un long escalier de pierre couleur sable chaud. Là, quelques grandes tables de bois grisées par le soleil et la pluie… avec des bancs en guise de chaises, le tout mis un peu n’importe comment pourvu que ce soit sous le tilleul. Un chat qui paresse… quelques grillons… et me voilà en train de déguster un melon –le jus dégoulinant sur la table (ah oui, elle est en pente ! me dit le serveur en souriant…)- et enfin, une tarte à la rhubarbe dont je ne vous dis que ça.
Arrêt du temps.
Au bout de… je suis repartie. Têtue, Dame GPS a continué son monologue (enfin, quand je dis monologue… ) et, au bout de… j’ai rejoint mon hôtel, aussi perdu que moi, à la différence que lui, c’était voulu.
Hôtel de charme, hôtel charmant, posé là au milieu de nulle part… sinon des rosiers… douceur de vivre…
Arrêt du temps.
Réveillée par le chant des oiseaux, après un bon petit déjeuner (ça creuse, le bien-être), il est temps pour moi de me diriger vers l’aérodrome de Romanin, à Saint-Rémy de Provence…
C’est vrai qu’il y a plus près… Montpellier a un aéroport… même Béziers en a un ! c’est tout dire ! Mais à Romanin, il y a un aéro-club de vol à voile… et ça, ça, c’est mon rêve depuis plus de 20 ans !
Mon rendez-vous était à 11h30. Bien entendu, j’y étais à 11h… Les sourires jusqu’aux oreilles de la secrétaire, du pilote de l’avion et de mon « moniteur » en disaient long sur les étoiles que je devais avoir dans les yeux…
Tout était prêt et m’attendait. Mon planeur avec ses grandes et longues ailes blanches, et l’avion qui allait faire qu’il s’envole…
… et mes deux bonhommes…


-       - dis, tu feras attention, pour l’atterrissage, hein, tu sais…
-    - non, non, ça va, c’est moi qui l’ai réparé… mais c’est pas à l’atterrissage, c’est au décollage…
Et je regarde l’un et l’autre, tour à tour… mon « moniteur » ayant à peine 25 ans...
S’ils croient m’impressionner… !


Tout m’est égal. Je vais planer. Pla-ner.
Une fois mis dans l’axe de la piste de décollage, mon petit jeune m’explique toutes les manettes et manomètres…
-       - alors, ça, et ça… il faut surtout pas toucher… (tu parles que je vais pas toucher !)
-       - oh, mais vous savez, moi, je ne touche à rien… mais alors, à rien du tout du tout !
-       - bon, alors, le parachute… voilà ce qu’il faut faire… mais seulement si je vous le dis… hein, pas avant… (ah ben, ça, y’a pas de souci…)
Parachute mis, entrée dans le cockpit, bouclée dans ma ceinture 4 points, me voilà installée, au ras du sol, les yeux fixés sur l’avion, juste devant moi, appareil photo en main…
Nous voilà partis… « ça y est…on a quitté le sol ! » me dit mon moniteur…  l’avion continue de nous tracter tandis que nous flottons dans l’air… nous devons arriver à 750m du sol pour qu’il nous lâche… je n’ai pas assez d’yeux pour tout faire… l’altimètre, les Alpilles, les ailes blanches, les photos… j’en veux encore plus… et soudain, l’avion plonge et nous flottons, dans un silence magique. Virages sur l’aile, à droite, à gauche… il m’explique que là-bas, on voit St Rémy, là, les Baux, et là Avignon… « oui, oui… » mais je m’en moque… je flotte… il cherche le vent, les « thermies »… il y en a trop peu… (c’est pour ça qu’il faudra que je recommence… !), fonce sur les Alpilles, tourne au moment où j’allais l’avertir qu’il y avait quand même un petit quelque chose qui nous arrivait droit devant… et je me délecte…  nous faisons des cercles, passons sur la crête de cette chaine de « montagnettes »  grises… je rêve…
Le temps est suspendu là, avec moi… je deviens un oiseau qui se laisse porter par le vent sans battre des ailes… magique…
Il faut qu’on revienne à la base… une demi-heure est passée… en moins de 5 minutes…
Je redescends sur terre… mais j’ai gardé les étoiles.




C'est mon mien....

Au-dessus des Alpilles

Droit devant... la piste d'atterrissage

samedi

Chronique d'une Cettoise - 7 - La campagnarde

La province… c’est vrai quoi, Sète est une petite ville, que dis-je, quasi un village, posée sur une presqu’île.
Près de pas vraiment rien, et presque loin de tout.
Un charme indéfinissable… des canaux sur les berges desquels des barques ou voiliers sont accostés. Des ponts partout, des rues à sens unique parce que trop étroites. Des sens interdits alors qu’ils devraient être autorisés –franchement, ce serait plus simple, une rue oui, une rue non-… et bien, c’est tout ça… et un peu plus…
Il y a la campagne à portée de main, là, tout près.
Si simple.
La campagne, on sait ce que c’est. Des arbres, des coquelicots, des genêts, des grands champs de blés. Alors, si on a la bonne idée de cueillir des coquelicots, on verra tout de suite qu’ils tiendront 30mn dans la voiture avant de s’éteindre mollement. En changeant son fusil d’épaule, on prendra quelques genêts… et on s’apercevra que ces petites fleurs jaunes si jolies dans la nature, le seront nettement moins sur le carrelage en l’espace d’un jour, et que les épis de blés seront vite des nids à poussière…
On a tous appris ça. Alors, on se contente de s’émerveiller de cette douceur.
Il y a aussi de grandes étendues de verdure plantée en rangs, bien alignés, que des agriculteurs (c’est le terme chic pour dire paysans) se sont échinés à planter.
C’est ce qu’on voit quand on se promène en voiture… histoire de respirer de l’air pur, une fois de temps en temps, avant de se replonger dans le brouhaha de la ville.
Oui, c’est tout ça, la campagne.
Mais en y regardant d’un peu plus près, la verdure se transforme en fraises (il suffit de soulever quelques feuilles, et ces petites boules rose et rouges apparaissent), en épinards, en fèves, en salades aux variétés multiples, en choux… et puis en rosiers…
C’est ce que j’ai découvert, moi, la citadine, quand je suis allée cueillir mes 2,3 kilos de fraises, mes épinards et ma batavia, mes 7 roses… et en attrapant au passage une vingtaine d’asperges (déjà ramassées)  juste avant de passer à la caisse…et payer… 13 euros pour le tout.
J’ai bien entendu pris une carte de fidélité… au bout de 120 euros de dépenses, j’aurai droit à 25% de réduction… je me suis aussi inscrite sur le site, de façon à être prévenue tout de suite quand les tomates, courgettes et autres fleurs montreront le bout de leur nez…
Je retournerai prendre la brouette et le sécateur mis à ma disposition, et passerai 2h d’air parfumé à choisir ce que je cuisinerai, ou mettrai en confitures…
J’ai espoir de trouver un autre paysan qui me vendra un poulet ou ce qu’il aura eu la riche idée d’élever…
Dans une semaine, je vais dîner dans une ferme conchylicole (cherchez dans le dictionnaire, ça vous fera de la lecture !) et avec de grands sourires, je tâcherai d’acquérir un peu de sa production au prix le plus bas.
D’ici là, je vais acheter des pots vides, et tenter d’apprendre à ouvrir les huîtres.




Chronique d'une Cettoise - 6 - J'ai dit bricoleuse ?

Hier matin, je me suis installée, après mon déjeuner, dans ce grand fauteuil que m’a prêté le magasin de meubles –en attendant le canapé, « mais vous l’aurez avant Noël »- (dis-le pour rire…) et j’ai regardé mon salon.
Presque vide.
Certes, le bureau en cérusé loupé est toujours là… mais c’est l’affaire de quelques heures… j’ai fait l’acquisition d’un bureau et de deux placards-penderies… ces dernières ont été achetées dans le rayon «enfant», puisque le seul endroit où j’ai décidé de les mettre, ne fait qu’1m60 de hauteur de plafond… et que, comme chacun sait, les armoires ne peuvent avoir qu’une hauteur minimum de 1m80.
Le tout, en pièces détachées, bien sûr.
J’étais donc assise, sourire aux lèvres, détendue, sirotant mon café, et je regardais mon salon presque vide, les 7 ou 8 cartons de pièces détachées, dans un coin…

Pleine de bonne volonté, je me suis décidée à hisser jusqu’à ma mezzanine ces quelques 120kg en décomposé (c’est fou comme la camelote pèse lourd, de nos jours…) et me suis attelée à la tâche.
Prudente et avisée, j’ai commencé par un placard. Réfléchissez ! si j’avais commencé par le bureau, je n’aurais plus eu la place d’étaler toutes les pièces du placard ! D’ailleurs, j’avais laissé au rez-de-chaussée, «l’autre», des fois que… sait-on jamais… une erreur est si vite faite… Bref.
L’expérience sert.
Les charnières de portes, vissées trop bas, par exemple, font que la porte frotte par terre… et qu’avant de comprendre que ça vient de là…
Que ces petites choses rondes qui bloquent ces trucs, qui ne sont ni clous ni vis… que si ces petites «choses» se sont si facilement enfoncées et que les autres pas… hé oui… il fallait bien lire… il y en a qui sont plus hautes que d’autres…

Notice dans une main et tournevis cruciforme dans l’autre, j’étais fin prête.
2 heures après, ma penderie était montée.
...sans l’étagère que j’avais pensé pouvoir mettre… mes robes étant légèrement plus longues que celles d’une petite fille...
Mais je suis satisfaite de moi, et telle une James Bond girl, relevant mon tournevis, j’attaque l’autre.
L’affaire est bien partie.
Jusqu’au moment où je m’aperçois que des 6 charnières, 2 sont différentes. Retour à la «case 1». Oui, oui… il faudra reprendre ton ouvrage… aujourd’hui peut-être, ou alors demain…
Mais je continue, pleine de courage. Quelques hésitations sur l’horizontalité du sol… mais sur ce dernier point, j’avoue humblement avoir fermé les yeux sur les 1,2° d’écart, estimant qu’ils ne feront pas choir mes jupes.
Retour aux charnières de la case 1.
Très pratiques à enlever, puisque, dans mon euphorie, j’avais déjà rempli de vêtements ladite « case 1 ».
Après avoir sué 30mn, je peux enfin m’adonner au plaisir de contempler mon œuvre : deux penderies, côte à côte, sur la petite estrade de ma mezzanine. Pleines.

Au bureau, maintenant… ah… petite nouveauté : un tiroir… deux rails, enfin 4… (réfléchissez : deux pour chaque côté ! un au-dessus, un en dessous…). Pas si simple. Surtout quand on lit le plan à l’envers. Faut prendre le plan et les pièces dans le même sens… exactement dans le même sens.
Œuvre accomplie.
Comme j’ai vu large, j’avais aussi pris ce que l’on appelle vulgairement un « caisson ». Une chose que l’on met à côté d’un bureau, pour aider au fourrage en catastrophe de papiers et autres documents.
4 tiroirs. 16 rails…
Et bien, au bout d’un peu plus de 6 heures de suée, mes quatre meubles étaient montés.
C’est quand je me suis relevée pour aller me faire à dîner (il était minuit passé, tout de même), que mon dos a crié au secours.
Demain allait être un grand jour de souffrances.

Couchée à 1h30 du matin, relevée à 2h pour reprendre une douche et me frictionner de Synthol, recouchée, etc, etc… j’ai finalement entr’ouvert un œil à 9h, au son strident de mon parlophone (oui, oui, j’en ai un !).
L’œil morne, le cheveu hirsute –conséquences de longues batailles avec mon oreiller- j’ai ouvert la porte au facteur.
Je doute fort que mon physique lui ait plu. Par contre, au vu de son regard ébahi et de ses sourcils en accents circonflexes, je suis sûre qu’il le gardera longtemps en mémoire.
Livraison d’un colis.
Je respire à fond, et ouvre mon colis.
Mes deux appliques me sont enfin livrées. Belles…
Finies les ampoules nues, sortant du mur. Finie, cette lumière crue ! Enfin !
J’aurais dû les acheter chez Ikéa. Leurs notices sont plus explicites.
Les marchands devraient proposer 3 produits pour le prix de 2. On s’entraîne sur le 1er et pour les 2 autres, ça va mieux. Ou moins mal.
Perceuse. Trous, chevilles… ah, les trous sont un peu grands… pour l’autre va falloir prendre une mèche plus fine… vis… enfin, quand je dis « vis »… une vis, je sais ce que c’est. Là… je doute…
J’avais enlevé l’ampoule, tenté d’enlever la douille (cette saloperie qui tient l’ampoule), mais comme nous sommes au XXIème siècle, je ne sais pas comment enlever une douille en plastique «moderne». Les fils sont longs, je coupe.
J’imagine d’ici vos «ah mon Dieu ! le courant…» c’est mal me connaître… oui, je m’étais occupée du disjoncteur !
J’arrive, non sans mal, à faire mes mariages de fils, et, je pose. Grand mot que voilà.
Ça ne va pas du tout. La vis qui doit sortir davantage, ne sort pas, et les fils qui, eux, ne doivent pas sortir, sortent… Au bout d’une longue heure, j’arrive à faire tenir l’applique… Au passage, j’en profite pour préciser que j’ai, bien entendu, acheté des appliques qui se cassent, si elles tombent… (c’est juste pour pimenter la chose…).
Bref, elle tient.
A défaut de savoir ce qu’il fallait faire pour la seconde, j’ai compris ce qu’il ne fallait pas faire. Mais la n°1 tient, c’est l’essentiel.
Au n° 2. Perceuse. Trous (moins grands), chevilles. Le tout plus haut de 2 cm environ par rapport au n°1. « Vis » moins profondément enfoncées… mariages électriques… pas de fausse note… j’ajuste. Ça tient !
Je me dis alors que le, ou la première d’entre vous à me faire une réflexion sur mes appliques passe la porte en sens inverse illico presto. 2cm, non, vraiment, c’est ridicule.
Je me drape dans ma dignité, me transforme en « invitée » et entre dans le salon, et… je vois mon applique n°1… non… Faut vraiment, vraiment, remonter le tout.
J’enlève la n°1, regarde où je devrais percer mes trous… en profite pour remarquer que les trous précédents, non, ils ne seront PAS camouflés… enlève «vis» et chevilles… en profite pour remarquer aussi que le trou fait au passage, s’est élargi… et que, oui, par voie de conséquence, il faudra que je plâtre pour combler. Je pose le tout.
Tiens, la n°2 a l’air de piquer du nez… je vais resserrer les « vis »… mauvaise pioche… il ne fallait pas toucher. La cheville ne veut plus rester dans le mur…
Je n’ai ni plâtre, ni chevilles de secours, ni ampoule halogène. Tout est fermé. Car j’y ai passé l’après-midi.

Je contemple mon salon. Le bureau en cérusé loupé est entouré de grands cartons éventrés et d’outils en tout genre.
Mon lampadaire est vraiment beau, allumé…
Je vous avais dit que j'avais pris une carte de fidélité chez Ikéa ?