mercredi

Chronique picturale - 1 -

Voilà donc un mois que je côtoie mon peintre surréaliste qui n'était pas surréaliste.
C'est lui qui l'a dit. Et voulu. Moi, je n'y connais rien, je suis donc d'accord. 
Et, fondamentalement, si ça lui faisait plaisir de ne pas en faire partie, des surréalistes, ça ne me dérange pas plus que ça, le résultat est là.
… "ce que nous appelons rose, sous un tout autre nom, sentirait aussi bon"… 
Il n'empêche que je me régale.

Je dois quelques explications. 
Je me promène donc, 7 heures par jour, au milieu de quelques 70 oeuvres d'un artiste "non-surréaliste" dont je ne suis pas fan. A priori.

Je découvre… et envisage ce que peut être l'in-envisageable. Et encore, j'en suis loin.

Certains (j'ai été la première) diraient qu'un enfant peindrait comme ça.
Non, pardon… un truc du genre "non, mais franchement, c'est du n'importe quoi, ça! mon môme, il ferait mieux !"
Sauf que. Sauf que c'est loin d'être évident. Très très très loin.
Il faut prendre le temps. J'avoue : moi, je l'ai. Le temps.

Je suis désolée pour les enfants, mais ils ne sauraient pas faire ce fondu de vert-je-sais-pas-moi… si fin et si lisse (et non, monsieur, ce n'est pas l'éclairage du musée qui fait "ça").
Je suis désolée pour les enfants, mais ils ne sauraient pas faire ces ronds si ronds que je me demande encore s'ils n'ont pas été faits au compas (merci de ne pas approcher la toile… ).
Oui, bien sûr, les enfants pourraient peindre sur n'importe quel support (ne touchez pas s'il vous plaît), que ce soit du contreplaqué, de la toile de jute, du papier beurk, de la masonite (et hop, on va chercher sur internet ?!), de l'eau forte, ou encore de la toile (youpiii, ça c'est normal !). 
Et puis, oui, les enfants pourraient aussi faire des "tests", mélanger des matières pour voir ce que ça donne. L'aquarelle, le fusain, les pastels, l'encre de Chine, l'huile, tout… 
Bien sûr.
Sauf que. Sauf qu'il n'y en a pas beaucoup qui le font.

Il faut être juste : le bonhomme savait peindre.
Peu importe qu'on apprécie ou pas le "résultat". Le fait est là : il savait peindre.

Oui, je me régale.
Je me régale de voir des choses différentes chaque jour.
Je me régale d'entendre les enfants donner leur titre à un tableau "sans nom". J'en ai plus de 30.
"Le clown jongleur", "Le jongleur qui danse", "La danseuse dans la nuit", "Le lutin à l'étoile"… et j'en passe…
Ce sont les adultes qui ont trouvé : "La cafetière", "Le marteau", ou "Le fauteuil"… 
Personnellement, je ne suis pas trop mécontente de mon "Clown jouant au bilboquet". Il doit me rester un peu d'enfance quelque part.
Mais tous ces titres se valent. Aucun n'est mieux que l'autre. Chacun a donné le titre de ce qu'il y voyait.
Il est juste possible qu'il y ait plus de poésie dans les yeux des enfants que dans les nôtres.

Essayer d'oublier le concret, et laisser le rêve prendre sa place.